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Storey
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Storey

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Elle avait toujours eu de la chance. Un soir, elle rencontra Robbie, un flic intéressant mais également un blaireau, travaillant pour une nouvelle division établie pour enquêter sur le type exact de spams qu’elle gérait bien. Au début, il n’avait aucun idée de ce qu’elle faisait pour gagner sa vie, mais après trois mois de relation, elle s’était dit merde et le lui a avoué – à un moment où il s’était trop engagé pour ne plus la fréquenter. Un mois plus tard, il mentionna que les noms de ses sites Web lui avaient été transmis dans un mémo et qu’elle sera mise sous surveillance.

Cette nuit-là, elle emballa ses trois ordinateurs portables et quelques valises de vêtements, prit un taxi pour la Station Euston où elle prit le prochain train en destination du nord. Coventry était le premier arrêt. Le contrôleur de billet l’aida à décharger ses affaires sur la plateforme. Elle recommença une autre vie, cette fois-ci sous le nom d’Araminta Smith, journaliste.

La seule chose qu’elle regrettait était d’avoir abandonnée derrière elle sa Coccinelle jaune.

Cliff était maintenant énervé. En effet, le travail à long-terme sur lequel elle travaillait durait depuis trois mois. Il l’accusait d’avoir la frousse, ne voulant pas tirer sur les ficelles. Le téléphone à l’oreille, elle s’imaginait son visage ridé se barricader, ses lèvres s’amincir, son regard froid à pattes d’oie s’assombrir petit à petit en lui disant de se grouiller et de faire en sorte que ça marche.

– Le moment n’est pas encore venu, dit-elle, il est sous pression au travail, il y a des inspecteurs au bureau – écoutes, pourquoi tu ne me laisses pas cette partie-là pendant que tu glandes avec les trois mousquetaires? Je te le dirai si j’ai besoin de conseils.

– Je n’oublierai jamais la première fois que tu m’as parlé, en me disant à quel point j’étais super et quelle formidable équipe on ferait. Tout ce que j’avais à faire était de t’aider à tendre le piège, de te donner une crédibilité pour que ce conseiller y croie? Tu as oublié tout ça? Les petites faveurs?

– D’accord, tu as fait ton travail, laisse-moi faire le mien. Il a mordu à l’hameçon. Il ne le sait pas, mais il a déjà mordu à l’hameçon.

– Maintenant tu as ramené ce grand mec, Storey, qu’est-ce que c’est que cette merde?

– Il a des capacités, non? Tu ne l’as pas remarqué?

– Il est malin, mais il n’est pas clair. Il croit se foutre de nous, mais j’ai prévu quelque chose pour lui.

– Tu vois, dit-elle. Je ne me trompais pas. Tu dois juste le surveiller.

– Oh, je le surveille bien. Je vais le surveiller de très près. Alors, c’est quand que David vivra sa première expérience?

– Bientôt, dans les jours qui viennent. J’ai encore quelques préparations à faire. Il ne me fait pas encore confiance. A très bientôt.

– Ne me raccroche pas au nez. Je n’ai pas encore fini.

– C’est ton problème, Cliff, tu ne finis jamais. Tu me soules – tu soules tout le monde. Ce serait super de recevoir un penny pour chaque mot qui sort de ta bouche.

– Un jour, tu regretteras de ne pas avoir été plus attentive. Tu es trop pressée, tu ne réfléchis jamais assez. Tu te mets toi-même dans la merde et tu n’arrives pas à t’en sortir.

– C’est ça la vraie vie, Cliff, sentant sa colère monter. C’n’est pas une émission de télé.

– Qu’est-ce que tu veux dire par là? Tu deviens dingue?

– Ça veut dire que je ne vais pas rester, assise là, à attendre que les bonnes choses viennent à moi. Mon père était chiant, mais au moins il essayait et savait ce qu’il voulait. Il ne restait pas les bras croisés à attendre que les autres lui apportent ce qu’il ne pouvait pas avoir. Il le faisait lui-même. Il était peut-être trop con pour le faire bien, mais au moins il essayait.

– Tu as une haute opinion de toi-même, jeune fille. Tu n’es qu’une arnaqueuse qui cherche à réussir, c’est tout. Ne montes pas trop sur tes chevaux.

– Si je ne le fais pas, qui d’autre le ferait?

Elle raccrocha avant qu’il n’ait le temps de répondre. Elle ne voulait pas entendre l’opinion négative de Cliff lui exploser dans la tête en ce moment.

Le problème était que Cliff lui avait remis Paul Storey dans la tête.

Et même si elle n’était pas contre le principe, elle n’était toujours pas sûre s’il était un divertissement ou un coup. Et cela la dérangeait.

CHAPITRE SIX

Sa rencontre avec Frost donna un résultat – il y avait une visite la semaine prochaine et peut-être une autre, s’il arrivait à les persuader que le quartier était acceptable. Paul sentit son estomac se serrer à l’idée que des étrangers visitent la maison, mais il savait qu’il devait lâcher prise. Cela faisait vingt ans qu’il n’avait pas vécu dans la maison, alors qu’est-ce qui le dérangeait?

Il envoya une réponse à Frost lui demandant de choisir: s’il voulait qu’il reste à la maison ou se mettre en dehors de tout ça. Il n’aimerait pas rencontrer les clients potentiels s’il pouvait se débrouiller seul – laissons Frost gagner son argent.

Il s’adossa sur sa chaise et ferma l’écran de son ordinateur portable. Il avait de la chance d’avoir encore un signal wifi, son père achetait toujours de nouveaux gadgets et était accro à l’internet tel un enfant lâché dans un magasin de jouets. Paul avait trouvé une caméra numérique, un magnétoscope à disque dur, une paire de jumelles numériques et plusieurs autres petits appareils électriques qui pourraient lui être utiles. L’internet était payé jusqu’à la fin du mois, il devra alors trouver une connexion ailleurs.

Il posa son ordinateur portable sur une table en face de la baie vitrée de façon à voir l’espace au-delà du jardin, un brin de pelouse tondu par la municipalité qui servait d’aire de jeu pour les enfants du quartier et un endroit pour chier pour les chiens errants. Après la porte d’entrée, il y avait un petit sentir, puis cette parcelle de gazon rugueux avant d’arriver dans la rue. Un couple de jeunes adolescents se renvoyait un ballon, en criant l’un sur l’autre et se faisant passer pour des joueurs de foot comme à la télé.

Paul se rappela qu’il faisait la même chose – Nom de Dieu, il y a presque trente années de cela – avec son compagnon de jeu, Johnny Hall qui habitait en bas de la rue. Mais sa préférence était de traficoter des vélos, avoir les mains huileuses en serrant une chaîne ou en changeant une roue. Paul avait une bonne coordination, même à cette époque. Il faisait partie de l’équipe de rugby de l’école, prenait le bus les samedis matins froids, montait dans une fourgonnette blanche pour se faire conduire aux écoles chics – King Henry VIII, Bablake, parfois même plus loin à l’extérieur de la ville. Puis, à l’âge de dix-sept ou dix-huit ans, après s’être fait raccompagné à l’école après le match, un groupe d’entre eux allaient au pub le plus proche. Il s’asseyait en silence, le dos contre le mur, pendant que les grandes gueules mentaient sur le sexe et sur diverses théories de complots d’extraterrestres auxquels ils croyaient.

Il se demandait comment les gens le voyaient maintenant, revenu de Londres la queue entre les jambes, sans emploi, réputation foutue, aucun ami en ville à l’exception de cette bande de sans cervelles sur laquelle il a atterri. Dans un sens, il était heureux que son père soit mort avant de lui faire face. Le problème à Londres avait explosé lorsqu’il était à l’hôpital, et Paul s’était arrangé pour lui cacher les nouvelles. Les quelques nouvelles communiquées n’avaient pas divulgué son nom et il n’était pas prêt à rendre les derniers jours de la vie de son père encore plus misérables.

C’était son problème et il devait faire avec et avancer, ne pas en faire un plat.

Il prit son téléphone, défila jusqu’au numéro de Milly, voulut l’appeler mais ne le fit pas, c’était trop tôt depuis leur dernière conversation. Il ne voulait pas qu’elle pense qu’il dépendait d’elle, qu’il ne pouvait pas se débrouiller sans une approbation de sa part. Il devrait cependant appeler Rick pour le garder dans le bain et le convaincre d’arrêter de déranger ses amis en allant frapper à sa porte.

Il fixait son écran, quand le téléphone émit son gazouillement électronique bizarre.

Et voilà, c’était la voix écossaise décontractée d’Araminta qui lui parlait, comme si elle le connaissait depuis longtemps. Il se rappela alors comment il s’était démené pour qu’elle accepte de prendre son numéro se demandant à ce moment-là si elle l’appellerait un jour.

– Je voulais prendre de tes nouvelles et te demander une faveur, lui dit-elle.

Elle se le mettait dans la poche, pensa-t-il: elle ne s’est jamais intéressée à lui auparavant, pourquoi commencer maintenant? C’était comme si elle s’ouvrait des horizons – fais comme si tu étais intéressé par quelqu’un, et tu pourras alors t’autoriser à lui demander une faveur.

– Vous autres êtes très exigeants, dit-il, à vouloir tout le temps me faire faire des trucs pour vous. Qu’est-ce que je suis, le nouveau larbin dans les quartiers des domestiques?

– Ok, très bien, c’était toi qui me tournais autour, je croyais que la proposition te plairait. A la prochaine, alors!

– Qu’est-ce que tu veux? dit-il avec un ton de lassitude, bien qu’il était vraiment intrigué et voulait la revoir.

– Ne sois pas aussi coincé. Tu as une voiture, n’est-ce pas?

– Pourquoi?

– J’aimerais que tu m’emmènes quelque part ce soir.

– Tu vas interviewer quelqu’un à propos de toute cette corruption?

– Tu peux le faire ou non? Une réponse simple, oui ou non.

Il n’arrivait pas à dire si elle était fâchée ou non – ce ton semblait être son défaut – il préféra rester sans réaction.

– Cliff ou un de sa smala ne peuvent pas t’y emmener? demanda-t-il pour gagner un peu de temps.

– Si je voulais que l’un d’eux m’y emmène, je n’t’l’aurais pas demandé?

– Difficile à dire. Tu es si diplomatique.

Il la devança en lui demandant où ils allaient. Elle lui répondit, à Coundon, au bout de Holyhead Road. Paul s’y était rendu une fois pour le baptême de son cousin Derek lorsqu’il était garçon, mais il ne connaissait pas vraiment le quartier. Il savait qu’il y avait une zone commerciale, où la vieille usine Alvis se trouvait. Son père lui avait dit qu’il y avait acheté un réfrigérateur chez Comet avant que le magasin ne fasse faillite. Il se souvenait vaguement qu’Alvis produisait des chars pour l’armée avant d’être vendu.

– Passe me prendre où nous nous sommes rencontrés l’autre soir. A sept heures, dit-elle.

– Dois-je amener quelque chose avec moi?

– Non.

– Alors qu’est-ce qu’on va faire?

– Je pensais que tu aimerais rencontrer mon mec.

CHAPITRE SEPT

Avant d’arriver à sa hauteur, il l’aperçut debout sur le bas-côté de la route. Il se gara. Il remarqua qu’elle portait une nouvelle tenue – des jambières à motifs brillants que beaucoup de femmes portaient, un grand pashmina crème retombant à la diagonale tel un poncho à partir de son cou et un sac à main blanc simple accroché à une épaule.

En grimpant côté passager, elle avait l’air d’être plus jeune, plus fraîche, comme si elle allait à son premier rendez-vous ne sachant pas ce qui l’attendait. Paul se sentit nerveux et se dit qu’il devait se ressaisir.

Elle jeta un coup d’œil à la voiture lorsqu’ils bifurquèrent du trottoir: une Volvo 60 vieille de dix ans, turbo diesel. Il avait l’impression qu’elle évaluait la voiture et son goût. Il sentit l’odeur de son parfum, le même que la dernière fois: une odeur de fruits avec un grain de boisé qui y ajoutait du caractère.

Elle fouillait maintenant dans la boite à gants, déplaçant ses paquets de chewing-gum, une mini-torche et quelques morceaux de plastique cassés de la pince de son GPS.

– Tu cherches quelque chose de particulier? demanda-t-il.

– J’ai pensé que je trouverais peut-être quelque chose sur toi. Un passeport, un permis de conduire ou quelque chose comme ça.

– Il n’y a rien à savoir.

– Un homme mystérieux, dit-elle sonnant plutôt comme à un ‘ouais’, l’accent écossais se révélant plus avec le temps. Tu atterris un jour à Starbucks et on apprend ensuite que tu connais tous nos petits secrets, alors qu’on ne sait que dalle sur toi.

– Qui est Cliff pour toi?

– Pas ce qu’il aimerait être.

– Et quoi donc?

– Utilise donc ton imagination, en lui lançant un regard vide.

– Tu es donc une journaliste de luxe et qu’est-ce qu’il est… un pauvre type de la ville? Pourquoi tu traînes avec lui?

– Bonne réputation. Places de concert. Drogues dures. Beaucoup de trucs malsains.

Il savait qu’elle disait cela pour le taquiner et même pas gentiment: elle s’en foutait vraiment de ce qu’il pensait.

– Quand j’étais à l’école, dit-il, c’était l’une des personnes à éviter. Il y en avait deux – lui et un autre garçon, un peu plus âgé, Wigton. Toujours en train de se bagarrer, tous les deux. Si je m’en souviens bien, Cliff s’était empiré en vieillissant, Wigton s’était ressaisi et avait remonté la pente.

– Y a-t-il une morale dans cette histoire?

– Je pense juste qu’elle est intéressante. Je me souviens d’y avoir réfléchi quand j’étais gosse. On voyait bien le chemin qu’ils prenaient dès leur treize, quatorze ans?

– Qu’est-il arrivé à Wigton?

– Un jour, il fut renversé par une voiture dans la rue avant son dernier jour d’école. Il jouait au foot. Il courait après le ballon lorsqu’une voiture surgit au coin de la rue et le propulsa contre un lampadaire. Le crâne fracassé.

– Donc tu ne sais pas ce qui lui serait arrivé plus tard. Il aurait pu reprendre ses habitudes.

– Peut-être, dit Paul en haussant les épaules. Mais il changeait en une personne différente. Et puis, tout était fini pour lui.

Elle lui donna les directions: il passa devant Gosford Green où il avait joué au tennis lorsqu’il était enfant, bien que les courts de tennis aient disparus depuis longtemps, devenues maintenant une aire de jeux. Puis il fit tout le tour du périphérique extérieur, pour finalement sortir en direction de Holyhead Road.

Elle lui dit de prendre à gauche au garage Texaco. Les maisons étaient soudainement plus grandes, éloignées de la route, avec un parking à l’avant et des arches en pierres au-dessus des portes d’entrée.

– Celle-ci, dit-elle en pointant du doigt.

Il ralentit et s’arrêta. Elle ouvrit la porte et se retourna pour le regarder.

– Tu viens?

– Qu’est-ce que je suis censé lui dire? Qui je suis, le chauffeur?

– T’en fais pas, il n’est pas du genre jaloux. Je pense que tu vas bien l’aimer.

Paul dévisagea David lorsqu’il leur ouvrit la porte et recula pour les laisser entrer. Il était de la même taille que Paul, pâle, la poitrine creuse, une barbe et des cheveux à poils durs couleur paille sale. Paul devina qu’il travaillait à domicile, peut-être un journaliste, comme Araminta prétendait l’être.

Elle fit des introductions rapides en faisant un signe de la main vers Paul, comme si David n’avait pas remarqué son entrée.

– Ne fais pas attention à lui, dit-elle à David, c’est quelqu’un que je connais, qui m’a accompagné.

David croisa le regard de Paul mais sans dévoilé, ou peut-être bien une vague curiosité. Il était probablement en rogne ou énervé contre sa petite amie de débarquer ainsi accompagnée d’un autre homme, pensa Paul.

Paul remarqua que la maison était grande mais l’air inhabitée – il aperçut à travers une porte ouverte une pièce sans moquette aux murs unis et rien d’autre, pas de meubles, ni de tableaux sur les murs. On sentait une odeur de pin de produit de nettoyage, comme si David était en train d’astiquer le plancher de bois avant leur arrivée.

David les conduisit vers une pièce à l’arrière. Paul remarqua de grandes baies vitrées donnant sur un jardin assez grand, propre, avec un hangar au fond, des lumières solaires clignotant dans les parterres à fleurs. Peut-être qu’il passait la majorité de son temps dans le jardin, pensa Paul, à tailler les rosiers ou tout ce qui se fait dans ces putains de jardins.

Araminta s’était assise sur un canapé en cuir noir et Paul s’installa en face d’elle. David leur demanda s’ils voulaient un café ou un thé ou quelque chose de plus fort, que tous deux refusèrent.

Il pensait que David avait l’air d’être un type soumis et fut surpris de l’entendre dire à Araminta de manière directe:

– Qu’est-ce que tu fais ici? Qu’est-ce qui se passe? Tu as dit que c’était important.

Elle croisa les mains sur ses genoux pour gagner un peu de temps, puis releva la tête pour le regarder.

– Paul est un collègue, d’accord? Je lui ai demandé de m’accompagner. Et c’est vrai, je devais absolument te voir ce soir.

Elle se tourna et regarda Paul.

– Peux-tu nous laisser une minute? Que penses-tu d’aller faire un tour dans la cuisine, par exemple.

Elle ne lui donnait pas le choix, à moins qu’il veuille se lancer dans une discussion inutile.

Il les laissa et ferma la porte derrière lui, fit le tour du rez-de-chaussée en ouvrant quelques portes avant de tomber sur un bureau – des étagères, une table avec un ordinateur portable, une lampe d’architecte et une chaise rembourrée sur roulettes. Il s’assit sur la chaise et regarda par la fenêtre qui donnait sur l’avant de la maison. Il faisait noir à l’extérieur, il n’arrivait à apercevoir que les rares voitures qui passaient dans la rue principale.