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Exhumation Du Roi Fae
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Exhumation Du Roi Fae

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Ryker leva les yeux lorsque Sol et Brokk s’approchèrent de sa table. Son troisième colocataire, Dain était déjà assis à table avec lui.

« Tu as déjà reçu un avis pour ton évaluation ? » demanda Sol.

Ryker secoua la tête et remercia le lutin qui lui apportait son repas. « Je n’ai encore rien reçu. Ils m’accordent peut-être plus de temps pour récupérer. »

Brokk lança à Sol un regard que Ryker ne comprit pas. « D’ailleurs, comment va ton aile ? »

Ryker tendit le muscle qui contrôlait son aile et elle se propulsa par-dessus son épaule. Il ne parvint pas à dissimuler la grimace provoquée par le mouvement.

« Elle n’est pas encore tout à fait remise. Mais grâce au guérisseur, elle va beaucoup mieux.

— Je n’en reviens pas que tu aies essayé de t’envoler avec les mains attachées par des chaînes, marmonna Sol en secouant tristement la tête.

— Pourquoi as-tu pris un tel risque ? Tu détestes autant l’école ? »

Ryker ressentit des picotements sur sa peau, le premier signe que quelque chose ne tournait pas rond. La question frôlait l’innocence, mais tous les Fae de l’Edge savaient consciemment en quoi consistait l’Académie. Personne ne voulait y assister.

La croyance commune disait qu’ils leur lavaient le cerveau et les transformaient en esclaves pour les humains. Il se souvenait des histoires racontées par ses amis. Tous avaient entendu des horreurs sur ce qui se passait derrière l’enceinte grillagée de l’école.

Les rumeurs disaient qu’ils aspiraient la magie des corps des Fae pour la mettre en bouteille, prête pour la consommation humaine. Ryker ne croyait absolument pas à ces clabaudages. S’ils étaient réels, toute trace de vie disparaîtrait des bâtiments. Et, les individus dans le réfectoire ne parleraient pas entre eux. Ils resteraient assis là avec des expressions figées.

Si les caractéristiques Fae de Ryker étaient retirées de son corps, il imaginait qu’il resterait entièrement vide. Pouvait-il accorder une confiance sans borne à ces mâles ? Voilà, la vraie question qui lui traversait l’esprit. Il était trop tôt pour lui. Il ne les connaissait pas bien.

Que se passerait-il s’il avouait la vérité à Sol ? Ryker ne voulait nullement risquer la sécurité de sa mère. Heureusement, elle avait gardé la bouche fermée après l’arrivée des policiers, donc rien ne l’impliquait dans sa tentative d’évasion.

« Dégage ! » résonna une voix féminine dans la cafétéria. Les regards se tournèrent vers les doubles portes ouvertes à l’autre bout de la pièce.

Ryker resta bouche bée devant la silhouette agile qui se contorsionnait dans les bras d’un mâle. Ryker venait à peine d’arriver, il ne connaissait ni le nom du mâle ni son rôle dans l’école. Les cheveux roses de la femelle s’emmêlaient. Elle se contorsionnait dans ses bras. Elle luttait pour essayer de se libérer.

Au début, il ne put rien voir d’autre. Lorsque son visage se tourna, Ryker remarqua qu’elle rougissait, mais pas d’embarras. Elle se déchaînait comme l’enfer. Il la regardait, et il voyait une tempête sur l’océan. Le feu provocateur qui flamboyait dans ses yeux gris brillait. Mais il détectait aussi une autre énergie derrière sa rage.

Il ne pouvait s’empêcher de s’interroger sur son histoire. Contrairement aux autres étudiants, elle était arrivée au réfectoire avec un pantalon ample en coton et un débardeur froissé. Ryker pencha la tête, il remarqua qu’elle ne portait rien aux pieds. Plutôt inhabituel !

En une fraction de seconde, la femelle avait donné un coup de pied au Fae sur sa droite. Ryker grimaça et plaça sa main sur son aine tandis que le pied de la femelle se connectait pile entre les jambes du gardien. Tous les mâles dans la pièce furent pris de sympathie. Un seul coup à cet endroit suffisait pour se souvenir à jamais de la douleur provoquée.

Elle se mit en mouvement à l’instant suivant. Ses doigts étirés ratissaient le visage de l’autre mâle. « Maurelle », aboya une femelle plus âgée.

La femelle en colère s’arrêta et leva les yeux. Il réalisa que la femelle sous les cheveux roses s’appelait Maurelle. Il ne put s’empêcher de remarquer sa poitrine qui se soulevait. Des larmes coulèrent dans ses yeux alors qu’elle s’arrêtait et regardait la vieille Fae.

« Qui est-ce ? » chuchota Ryker. Il ne voulait pas attirer l’attention sur lui, mais il désirait savoir pourquoi la femelle avait cessé de se battre. Une légère sensation de picotement filtrait dans l’air et obligea Ryker à serrer les dents.

« C’est la directrice Gullvieg. Elle est sûrement la Fae la plus puissante de Bramble’s Edge en matière de manipulation mentale, répondit Sol.

— Tu vas me tuer aussi, maintenant ? » cracha Maurelle.

Elle rejeta son buste en arrière pour déloger la main sur son épaule.

À sa question, une certaine tension emplit la pièce. Ryker attendait toujours que quelqu’un empêche Maurelle de contester l’autorité de Gullvieg, mais rien ne se produisait. La directrice plissa les yeux et s’approcha de la femelle énervée.

« J’attendais ton arrivée, ainsi que toute l’Académie, pour prononcer mon discours de bienvenue. Commande ta nourriture et va prendre place », suggéra la directrice. Le ton vif utilisé pour prononcer le nom de Maurelle un instant auparavant avait disparu. Elle aurait aussi bien pu parler de la météo, pensa Ryker. Rien n’indiquait que Maurelle l’avait énervée.

Les deux mâles se tenaient de chaque côté de Maurelle, et la stressaient. Avant même que Ryker ne s’en rende compte, il se leva. La main de Brokk sur son avant-bras l’empêcha d’aller au secours de la femelle.

Après avoir lancé aux mâles un foudroyant « regard-qui-tue », Maurelle leva le menton et traversa la pièce. Son regard croisa celui de Ryker. Il dut s’efforcer pour dissimuler sa réaction.

Il la trouvait belle. Son visage étroit contrastait singulièrement avec les rondeurs de sa silhouette. Elle était grande. Mais elle n’avait pas le corps droit comme un bâton typique d’une Fae. Le débardeur se resserrait sur ses seins plus généreux que la moyenne, et ses hanches se balançaient à chaque pas.

En tant que Fae, Ryker n’était pas étranger au sexe, mais Maurelle avait précipité son esprit directement dans la chambre. Il s’interrogeait sur la douceur de ses lèvres, pincées et aucunement accueillantes à ce moment même, mais cela n’estompait pas son attirance.

Ryker retomba sur son tabouret. Il l’observa serrer les poings tout en fixant la directrice du regard.

Elle resta là pendant un instant avant de se diriger vers une table. Son regard fixait maintenant Ryker. Ses ailes voletaient nerveusement dans son dos. Les couleurs turquoise et rose vif correspondaient à ce qu’il décelait dans sa personnalité. Il avait devant lui l’une des femelles les plus fortes qu’il ait jamais vues.

Elle ne s’était pas retournée. Elle avait traversé la salle comme une poupée placide. Sa prestance le séduisait autant que sa silhouette. Son feu l’attira vers elle avant même qu’il ne la regarde. Après avoir reçu du pain et d’autres produits, elle jeta un coup d’œil tout autour de la pièce.

Son cœur se mit à battre à toute vitesse. Il voulait se lever et aller vers elle lorsqu’elle se dirigea vers lui. Avec ses crampes d’estomac et son front trempé de sueur, il avait du mal à rester assis. Elle se dirigeait en effet vers sa table, alors qu’au moins dix autres tables libres attendaient autour de lui. Il n’avait vraiment aucun besoin de créer une amitié avec cette femelle fauteuse de trouble. Il avait déjà suffisamment énervé les forces de l’Académie en essayant d’échapper à la collecte.

Ryker força son regard vers sa propre nourriture, il ramassa sa fourchette et commença à manger. Il ne put se retenir de lever les yeux pour voir où elle avait décidé de s’asseoir. Quand une main délicate atterrit à côté de lui, sa tête se leva comme une fusée.

Maurelle tirait précisément la chaise à côté de lui. Quand elle rencontra son regard, il ne put s’empêcher de remarquer les cernes sous ses yeux. Cela lui fit penser qu’elle se battait aussi durement que lui.

« Salut toi ! » dit Brokk de l’autre côté de la table avec un petit geste. Maurelle le regarda et lui adressa un signe.

« Je suis Brokk. J’ai entendu Gullvieg t’appeler Maurelle, c’est ça ?

— Oui, répondit-elle avant de tourner la tête vers Ryker.

— Tu es nouveau, n’est-ce pas ? Comment va ton aile ? »

Abasourdi, il dissimula le choc en fourrant un gros morceau de nourriture dans sa bouche. Il hocha la tête pendant qu’il mâchait et déglutissait. « Je suis Ryker. Et l’aile s’améliore. Les guérisseurs de l’Académie ont déployé des efforts considérables pour la remettre en état de marche. » Il fléchit le muscle de son aile, pour la faire passer par-dessus son épaule avant de l’abaisser à nouveau. Il ne voulait pas paraître impertinent, alors il lui parla, mais il ne voulait pas approfondir non plus.

Sa tentative d’évasion avait déjà suffisamment attiré l’attention. Il ne ressentait aucun besoin d’ajouter Maurelle à sa liste d’amis proches et de provoquer un examen minutieux de la part de Gullvieg. Il espérait avoir dissipé les craintes de la vile directrice à son sujet.

Maurelle se pencha en arrière sur son siège, elle leva sa main vers l’aile et la tendit comme pour la toucher. Instinctivement, Ryker l’abaissa. Elle comprit probablement la raison de ce geste brusque et elle laissa retomber sa main. Malgré son attirance flamboyante pour elle, il pensait qu’ils feraient mieux de garder leurs distances.

« Tu es vivant, c’est déjà ça. Je craignais que tu ne sois mort aussi », avoua-t-elle.

Une grimace s’esquissa sur son visage alors qu’elle poussait la nourriture dans son assiette.

La directrice se leva et posa ses mains sur ses hanches. « Je voudrais souhaiter la bienvenue à tout le monde pour cette nouvelle année à l’Académie de Bramble’s Edge. Je dirige avec fierté cette institution depuis trois siècles. Vous ne recevrez nulle part une meilleure éducation pour apprendre à contrôler vos capacités. Nous venons d’accueillir plusieurs nouveaux étudiants qui seront évalués après-demain. »

Gullvieg expliqua où se trouvaient les salles de classe ainsi que les différents champs d’entraînement. Ryker écoutait ou plutôt il feignait de prêter attention au discours. Il était concentré sur Maurelle. Comment cette femelle avait-elle découvert sa tentative d’évasion ? L’avait-elle vu essayer de voler alors qu’il était enchaîné ? Ses colocataires s’étaient retirés dès l’instant où le discours de bienvenue avait commencé, car ils n’avaient pas besoin de l’écouter.

En rapprochant son tabouret de Maurelle, il se pencha vers elle et murmura : « Comment sais-tu ce qui m’est arrivé ? »

Ses yeux gris étaient bordés de rouge lorsqu’elle se concentrait sur lui et la sueur perlait sur son front.

« Oh. Le collecteur qui est venu me chercher a utilisé ces bandes magiques…

— Les entraves, l’interrompit-il en expliquant le nom du brassard.

— Peu importe, dès qu’elles m’ont touchée, je t’ai vu essayer de t’échapper et tomber après avoir heurté la barrière, répondit-elle en agitant sa main.

— Tu possèdes des aptitudes psychométriques ? »

Il réfléchissait à ce qu’elle venait de dire. Elle aussi avait lutté au moment de sa prise en charge. Il ne trouvait rien de surprenant à sa résistance. Il s’inquiétait de son état, malgré tout il restait déterminé à maintenir une relation superficielle entre eux. « T’ont-ils blessée quand ils t’ont capturée ? »

Ses yeux se remplirent à nouveau de larmes et elle baissa la tête. Il observait ses épaules courbées. Il avait été témoin de son combat un peu plus tôt, elle avait perdu à chaque reprise. Elle lui brisait le cœur. Il marmonnait des insultes contre lui-même et se sermonnait en silence pour se convaincre de rester immobile. Il ne devait pas essayer de la réconforter. « Non. Je n’ai pas été blessée, mais ma mère… elle a… elle a essayé de m’aider. »

Elle parlait d’une voix tellement basse qu’il dut se pencher vers elle pour l’entendre. « J’espère que ta maman va bien. La mienne n’est pas intervenue lorsque j’ai décollé par la fenêtre.

— Tu as de la chance qu’elle ait tenu sa langue. Ils ont tué ma mère », lança-t-elle en serrant les dents.

Le choc l’empêcha d’apprécier le feu intérieur qu’elle venait d’exhiber. « Quoi ? Pourquoi restes-tu ici ? Je suis désolé », ajouta-t-il avec précipitation. Son commentaire ne laissait pas transparaître la moindre trace de sensibilité. Jamais auparavant il n’avait entendu une histoire impliquant la mort lors d’une collecte. La disparition de la mère de cette belle femelle lui donnait envie de sabrer le cabinet au pouvoir et de nettoyer la maison. Il trouvait la situation purement et simplement inacceptable.

Il se rappela que cet épisode n’était pas isolé et tous ces incidents semblaient liés. Aucun Fae ne devrait souffrir comme ça. L’injustice frappa directement au plus profond de son âme. Il restait assuré que la situation personnelle de Maurelle n’était pas la seule cause.

« Ces gens sont des monstres. Si j’avais le choix, je rentrerais à la maison avec mon père et mes sœurs. Ils vont l’envoyer vers l’au-delà. »

Il posa la paume de sa main sur son épaule pour lui offrir un peu de réconfort. Elle se tourna vers lui, mais ses yeux ne souriaient pas. Il retira sa main. Son chagrin la portait à vif et la coupait en lambeaux. Malgré tout, il ne voulait pas se rapprocher d’elle. Hélas, en un éclair, il réalisa qu’il était peut-être déjà trop tard.

Tout ça expliquait l’apparence de ses vêtements. Ils ressemblaient davantage à un pyjama qu’à l’uniforme noir estampillé du logo de l’école. Comment avaient-ils pu prendre la vie de sa mère puis la forcer à assister à un banquet de bienvenue comme si de rien n’était ?

À ce moment, il comprit clairement que les rumeurs sur l’Académie — ou peut-être pas les rumeurs sur l’Académie, mais les rumeurs sur les humains au pouvoir — disaient vrai. Après tout, toutes les histoires d’horreur ne naissaient-elles pas de faits réels ?

Ce drame ne relevait certainement pas de l’évènement isolé. Ils étaient trop préparés à forcer cette femelle à s’incliner devant leurs volontés. Gouverner par la peur assurait un nombre minimal d’objections. Ils lançaient des sorts et avaient recours à d’autres subterfuges pour empêcher Maurelle de parler, mais ils ne cherchaient pas à soulager sa douleur le moins du monde.

La scène spectaculaire de son entrée dans le réfectoire avait attiré l’attention. Aucun doute ! Plusieurs étudiants autour d’eux avaient entendu toute l’action. La rumeur de la mort de sa mère se répandrait sur le campus en un rien de temps.

« Tu n’es pas seule ici », promit-il. L’espoir envahit son regard. « Malheureusement, je soupçonne que tu rencontreras d’autres élèves susceptibles de se raccrocher à ton vécu », ajouta-t-il. Il voulait s’assurer qu’elle comprenait bien qu’il ne parlait pas de lui-même.

« Je sais que tu as raison. C’est pourquoi je… ugh », bafouilla-t-elle. Elle grimaça et posa une main sur sa tête. La pâleur de sa peau prit une nuance vert maladif. Sa tête se déplaçait d’avant en arrière, ses mèches roses volaient.

« Tu n’as pas l’air en forme. As-tu déjà vu un guérisseur ?

— J’étais malade quand les collecteurs m’ont emmenée. Ils m’ont obligée à venir ici en premier.

— Tu as l’air horrible. L’infirmerie se trouve au deuxième étage, en bas de l’aile est. »

Il se leva, il ne pouvait vraiment pas lui offrir davantage. Hors de question de placer plus de cibles sur son dos qu’il en avait déjà.

« Merci », marmonna-t-elle. Elle se leva à son tour.

Il marchait à côté d’elle et aurait souhaité agir pour améliorer sa situation. Ni l’un ni l’autre ne parlèrent en marchant. Il agit comme un imbécile et il ne lui dit même pas au revoir quand ils se séparèrent. Il continua jusqu’à son dortoir au quatrième étage.

Ses tripes tourbillonnaient. En même temps, son aine pensait que ce serait une bonne idée de se laisser aller à son attirance. Alors qu’il venait de se flageller de l’intérieur pour avoir traité Maurelle avec ennui. Maintenant, une douche froide s’imposait.

CHAPITRE IV

« Les emplois du temps sont-ils toujours aussi bien remplis, ici ? » demanda Ryker à son colocataire. Il vivait à l’Académie depuis quelques jours maintenant et ils avaient travaillé plus dur que dans le boulot à temps partiel qu’il occupait avant d’être emmené à l’école.

La plupart des jeunes adultes Fae gagnaient leur vie. Ils devaient aider à subvenir aux besoins de leur famille. Mais ils travaillaient rarement plus de dix heures par jour, ce qui contrastait largement avec les informations étalées leurs cours d’histoire. Les professeurs devraient savoir que les élèves n’avalaient pas le babillage qu’ils essayaient de leur enseigner. Ils se tuaient à la tâche pour arriver à joindre les deux bouts.

Les enseignements de l’Académie semblaient véritablement biaisés en faveur des humains. Entendre les enseignants évoquer la manière dont les humains étaient entrés pour sauver Bramble’s Edge de la ruine l’exaspérait et révélait l’Académie sous son vrai jour.

À son arrivée, il voulait crier sa rage à tous ceux qui leur débitaient ces sornettes. Mais au fil du temps, il commençait à comprendre. Il n’avalait pas l’idée que les humains les avaient sauvés alors qu’ils les avaient réellement attaqués en premier.

Leurs armes l’avaient emporté sur les capacités des Fae et affaibli le royaume. Sa mère lui en avait suffisamment raconté pour comprendre leur stratégie guerrière. Les Fae avaient essayé de se défendre pendant que les humains s’acharnaient pour prendre le pouvoir qui stabilisait le peuple Fae.

Une partie de la puissance du roi et de la reine Fae avait maintenu l’équilibre, à la fois entre les races et du point de vue des individus. D’après les explications de sa mère, chaque fois qu’un membre du royaume se laissait dominer par son propre pouvoir, le Roi intervenait et le remettait à sa place. Leur simple présence dans le royaume fournissait une source de stabilité pour toute la race.

À la mort du roi et de la reine, ce pouvoir disparut, la puissance des Fae s’effondra. Le chaos qui s’ensuivit permit aux humains de s’immiscer et de prendre le contrôle de leur royaume.

Dans les premiers temps, la plupart des êtres surnaturels, en particulier les Fae trouvaient difficile de gérer autant de pouvoir. Tous les membres de cette espèce extatique s’engageaient à fond dans leurs passions. Le but réel de l’Académie résidait dans l’apprentissage de la maîtrise des pouvoirs, sa mère se plaignait sans fin à ce sujet. Les humains pervertissaient l’œuvre du roi Oberon créée des millénaires auparavant.

Il comprenait exactement ce que sa mère voulait dire, pas au sujet des objectifs de l’école, mais de la partie sur le contrôle des pouvoirs. En effet, à maintes reprises, ils avaient dû renvoyer ses nouveaux amis venus lui rendre visite. Il s’était parfois réveillé avec la peau fripée comme après un bain dans le petit étang près de la boucherie où travaillait Galina.

Ses compagnons de dortoir relataient tous une ou deux mésaventures semblables qui leur arrivaient sans cesse, mais Ryker avait remarqué plusieurs situations qui le laissaient perplexe. Il n’avait pas encore identifié ses pouvoirs. Même les professeurs qui l’évaluaient semblaient déconcertés. Ils l’avaient finalement placé dans la ligue de l’air.

Apparemment, il avait manifesté beaucoup de capacités associées à celles des Fae de l’air. Il ne parvenait pas à définir ses sentiments à cet égard. Il ne ressentait qu’une faible aptitude à manipuler les pensées ou à rêver en marchant ou à communiquer directement avec l’esprit de quelqu’un. Par ailleurs, il ne ressentait pas non plus d’autres pouvoirs de l’esprit.

Il avait hâte de découvrir le potentiel de son esprit, mais la ligue du feu l’attirait particulièrement. La façon dont sa colère montait en flèche et la façon dont il frôlait les bagarres lui donnaient l’impression que son élément s’exprimerait dans le feu. Ces pulsions se manifestaient bien plus que ses autres capacités.

Chaque Fae avait des aptitudes de base. C’était une des raisons pour lesquelles Ryker n’était toujours pas convaincu par la voracité des préjugés de sa mère envers les humains. Les humains ne vivaient pas aussi longtemps que les Fae. Et ils n’avaient pas de force ou d’audition transcendantes. Ils ne pouvaient pas non plus activer de processus de guérison accélérée.

Les Fae pouvaient également sublimer leur apparence dans une certaine mesure. Un faible niveau de compétence pouvait être amplifié chez certains qui possédaient un talent supplémentaire dans ce domaine. Ceux qui possédaient les capacités de projeter leur charme avaient commencé à vendre des boucliers conçus pour déguiser les apparences des Fae. Ils pouvaient ainsi quitter l’Edge et partir vivre hors les bidonvilles. Quinze ans auparavant, l’unité des détectives avait été formée pour les démasquer.

Le père d’Eitin travaillait comme détective à la frontière. Il empêchait les Fae et les métis de quitter l’Edge. Sa mère détestait cette amitié avec Eitin, mais tous les deux formaient un duo inséparable. Et, sa maman n’avait jamais caché ses sentiments à Eitin non plus.

Sa mère lui répétait la leçon en disant qu’un Fae ne devrait jamais utiliser ses capacités à pressentir un autre Fae contre sa propre espèce. Pour plaisanter entre eux, ils essayaient de deviner combien de fois elle repasserait son sermon.

Quand Eitin recevrait ses pouvoirs, il appartiendrait sans aucun doute à la ligue du feu. L’affectation de Maurelle l’intriguait. Il ne l’avait pas revue depuis qu’il l’avait regardée marcher vers l’infirmerie, mais il ne pouvait pas s’empêcher de penser à la belle femelle. « Tu cherches les ennuis », se prévint-il pour la millième fois cette semaine-là.

Quelle bénédiction, il ne l’avait pas vue ! Il parviendrait ainsi facilement à garder ses distances.

Son esprit têtu refusait de penser à quoi que ce soit d’autre. Les pouvoirs de la femelle allaient-ils s’exprimer dans l’air ou le feu ? Peut-être même l’eau ou la terre. D’après ce qu’il avait aperçu d’elle, il doutait qu’elle appartienne à la terre. Si c’était le cas, avec la rage furieuse qui l’habitait à ce moment-là, elle aurait sûrement déclenché un tremblement de terre ou appelé un rocher.

Elle n’appartenait probablement pas à la ligue de l’eau pour des raisons similaires. Les gardes n’avaient pas commencé à saigner des yeux, et l’océan qui bordait l’école n’avait pas envoyé de raz de marée s’écraser dans le réfectoire. Au plus profond de lui, il espérait qu’elle le rejoindrait dans la ligue de l’air. Elle avait manifesté d’étonnantes capacités psychométriques, mais elle n’était pas encore apparue en classe. C’était préférable pour lui, se rappela-t-il. Il n’avait aucun besoin de multiplier les rencontres gênantes avec la femelle.

Ryker chassa Maurelle de ses pensées ainsi que la façon dont son chagrin le révoltait. Il quitta sa chambre et plaça les protections possibles sur la porte. Dans sa ligue, personne ne devrait atteindre ses capacités à manipuler les métaux. Cette aptitude ébauchait un trait de la terre, mais il ne voulait pas que quelqu’un entre dans son espace en son absence.

« Hé, Ryk. Tu vas bien ? Tu as manqué le petit déjeuner », fit remarquer Dain en sortant de sa chambre. Les dortoirs se situaient dans de grands bâtiments de cinq étages. La conception de l’installation lui autorisait une indépendance largement supérieure qu’à la maison, et rendait son séjour à l’Académie beaucoup plus agréable.

Dain n’avait pas l’air trop pressé de quitter le canapé et d’aller en classe tandis que Sol et Brokk tenaient leurs livres et blocs-notes en main. Leurs chambres étaient toutes disposées autour d’un coin salon central. Ils devaient s’entraîner et étudier dans cette pièce.

« Oui. Je ne me suis pas réveillé », mentit-il en ajustant ses livres. Il ne savait pas s’il pouvait avoir confiance en eux et partager les questions persistantes qui le hantaient. Certes, ses doutes et ses objections au sujet de l’Académie diminuaient au fil des jours, mais ils ne s’étaient pas complètement évanouis.

Sol gloussa et secoua la tête. « Moi non plus, je ne voulais pas sortir du lit à cinq heures du matin. Ce matelas doit être rempli de nuages ou d’un truc du genre. Je n’aurais jamais cru que je dormirai un jour dans un lit si confortable. »