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La Pluie De Sang
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La Pluie De Sang

5

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La Pluie De Sang

– Tu n'es pas venu ici pour moi. Angelica fronça les sourcils, puis elle souligna ce qu'elle pensait être évident. Tu es venu parce que tes fils sont ici. Et d’ailleurs, j’aimerais rajouter qu’on dirait qu’ils ont le même âge que toi… un peu comme tes frères… mais pas comme tes enfants. Et maintenant tu restes là pour aider Storm à combattre les démons.

Sa voix vacilla lorsque son dos heurta le mur et ses paumes de mains la bloquèrent de chaque côté d'elle… la piégeant efficacement contre le rocher du château.

– C'est ma partenaire qui aide Storm… pas moi, grogna Syn. Je ne suis là que pour la protéger et qu’elle ne se fasse pas tuer à nouveau !

– On ne m’a jamais tuée, nia Angelica. Elle trembla quand le mur se fissura, remontant en lignes irrégulières sous ses paumes jusqu’à sa tête et ses épaules.

– Arrête ! chuchota-t-elle en respirant à peine.

Quelque chose n'allait vraiment pas chez lui, mais bizarrement, ça ne lui faisait pas peur. Non, tout à coup, elle eut le sentiment d’avoir le cœur brisé. Elle respira de manière plus ralentie, voulant être prudente en ce moment, parce qu'elle sentait que si elle ne l'était pas, l’homme puissant qui était devant elle allait exploser… et une peur profonde risquerait de l’envahir.

– Laisse-moi te prendre dans mes bras jusqu'à ce que je me calme, lui dit Syn, juste au moment où il se pencha en avant et la traîna contre lui.

Comme Angelica ne résistait pas, Syn sentit qu’une partie du chagrin qui l’écrasait lui quittait les épaules. Elle ne se souvenait peut-être pas de sa mort, mais c'était un souvenir qu'il avait encore du mal à garder enfoui au plus profond de lui-même… sinon il risquait de devenir fou. Maintenant son emprise, il s'abaissa lentement au niveau de ses genoux, la tirant avec lui le long du mur. Il laissa une main tremblante courir sur ses cheveux sombres et soyeux, puis il pressa sa joue dans l'arc de son cou, en posant ses lèvres contre sa tempe.

Angelica cligna des yeux lorsqu'elle sentit son corps trembler contre le sien et entendit son souffle dans son oreille. C'était comme s'il luttait contre quelque chose qu'elle ne pouvait pas voir. Trouvant qu’il s’agissait là d’un bon prétexte pour s’abandonner à lui, elle se détendit lentement contre lui et le laissa faire. Elle se sentit étonnée de la chaleur et de la protection qu'elle ressentait lorsqu'il la tenait dans ses bras. Il était si grand et si fort qu'elle pouvait même sentir sa retenue quand il l’étreignait.

Comptant sur son courage pour apaiser sa curiosité, elle garda un ton calme et doux :

– Je ne comprends pas ce que j'ai fait pour attirer son attention.

– En effet… je suis sûr que tu ne comprendrais pas, admit Syn en embrassant doucement ses cheveux noirs avant de poser sa joue contre elle.

Une partie de lui ne voulait pas lui rappeler leur passé houleux… ni voir les éclairs de haine dans ses yeux pour ce qu'il avait fait. Surtout qu’il n'avait pas l'intention de lui demander pardon. Ils méritaient tous de mourir.

– Tu ne m’es pas très utile, ajouta Angelica, se sentant légèrement épuisée par toutes les poussées d'adrénaline qu'elle avait pu subir au cours de ces deux dernières heures.

Elle ne lui avait pas menti… elle n'avait pas peur de lui… pas du tout. Elle l'avait presque vu se suicider pour ramener à la vie un endroit plein d'enfants assassinés. Comment pouvait-elle vraiment le craindre alors que c'était tout ce qu'elle pouvait faire pour ne pas lui tendre la main ? Il fallait qu’elle trouve un moyen de s'éloigner de lui définitivement.

– Tu es cruelle envers moi, Angelica, chuchota Syn après avoir entendu ses pensées les plus profondes. Si tu gardes ton âme enfermée, tu sauras à quel point tu m'as rendu cruel.

Sa peur s’accrut à ses paroles et Angelica essaya de la repousser. Mais en vain. Voulait-il prendre son âme à elle aussi ? Était-ce la raison pour laquelle il la harcelait ?

– Tu n'as aucun droit sur mon âme et tu n'en auras jamais, insista-t-elle alors que son instinct de lutte s'emparait d'elle, la poussant à intensifier sa lutte.

– Et pourquoi ? grogna Syn en sentant sa santé mentale défaillir. Dois-je détruire un autre monde juste pour te le prouver ?

Les yeux d'Angelica s'élargirent et elle s'immobilisa. Que voulait-il dire par détruire un autre monde ? Elle décida de ne pas le lui demander, parce que, sérieusement, qui voudrait savoir ce genre de choses ? Elle ressentit une peur non désirée s'accrocher à elle-même après avoir repoussé les questions qui la dérangeaient dans le coin le plus sombre de son esprit.

Il sentait son souffle s'accélérer, se plaçant contre son cou dans des bouffées douces et chaleureuses. Même si cette sensation était apaisante, elle lui chauffait le sang, ce qui n'était pas bon pour sa maîtrise de lui-même. Ce monde l'avait gardé à distance assez longtemps. Il serra son emprise et courba son corps autour d'elle pour la protéger lorsque les petites ampoules du grand lustre du centre de la pièce se mirent à exploser, envoyant des étincelles qui s’éteignait peu à peu en atteignant le sol.

Angelica commença à regarder le plafond, mais Syn ne la laissa pas lever la tête. Du coup, elle resta pressée contre lui en se demandant que faire. L'aube était en train de se lever, baignant la pièce dans une légère pénombre.

– On serait pas en train de nous disputer, là ? demanda-t-elle en chuchotant.

Parce que si c'était le cas, elle savait déjà que c’est elle qui allait perdre.

– Non, grogna-t-il d'un ton dur.

Il fixa le miroir ovale de la coiffeuse qui se mit à craquer assez fort.

– Et si tu me disais ce qui ne va pas avant d’encore complètement détruire ma chambre ? lâcha Angelica.

Syn se figea lorsqu’il l'entendit dire « encore ». Se souvenait-elle enfin de choses qui ne s'étaient pas produites dans cette vie ? Ni dans ce monde, d'ailleurs ? Son âme était-elle assez forte pour enfin secouer la cage de sa prison mortelle ? Il pointa doucement sa main dans les cheveux noirs dans lesquels ses doigts étaient emmêlés pour qu'il puisse se pencher en arrière d'elle et aller chercher la vérité dans ses yeux.

– Encore ?

Sa voix tremblotait, comme hantée, même à ses propres oreilles.

– Quoi… demanda Angelica, confuse.

Alors ça… c’est comme s’il était partout, ce qui l'empêchait de suivre. C'était vraiment épuisant.

– Tu m'avais dit de te dire ce qu’il n'allait pas avant que je détruise ta chambre… encore une fois, répéta-t-il en insistant sur le mot « encore ».

– C’est bien ce que j'ai fait, chuchota Angelica en sentant des frissons glacés effleurer ses bras. Sa bouche s’entrouvrit pour le nier, mais elle avait dit « encore » et elle ne pouvait pas revenir en arrière maintenant, parce que cela ressemblait vraiment à la vérité.

Syn laissa la frustration l’abandonner et un lent sourire lui fit grimacer les lèvres. Il avait déjà détruit sa chambre plus d'une fois, et même s'il n'avait aucun moyen de savoir quel souvenir avait du mal à percer, il s'en fichait. Bon ou mauvais, il l'attendait avec impatience, ainsi que la bataille qu'ils auraient probablement dû livrer à ce sujet.

Son âme était la plus intime des âmes et lui avait déjà pardonné… c'était ce qu’il restait d'elle et il devait se forcer à se rendre.

L'attrapant en souriant devant tant de confusion, Angelica le repoussa, reconnaissante qu'il lui lâche les cheveux avant de lui faire le coup du lapin.

– Parfait si tu aimes redécorer les chambres pendant ton temps libre… peu importe. Si tu ne pars pas et ne me laisses pas me reposer, c’est moi qui vais te redécorer !

Elle fronça les sourcils lorsqu’il disparut d’un coup, faisant résonner dans la pièce l’écho de son rire chaleureux, qu’elle entendit s'estomper au lointain. Elle ne se souvenait pas l'avoir entendu rire comme ça… ni même sourire pour de vrai. Alors pourquoi cela lui faisait mal à la poitrine, comme si elle avait à la fois récupéré et perdu quelque chose qui lui était cher ?

Se sentant soudainement épuisée, elle se mit à ramper jusqu'au lit et se hissa sur le matelas en essayant d'ignorer la sensation de tout le temps tomber en arrière. Elle vit le vague éclat de son sourire chaleureux. Ce même sourire qu'elle venait de prétendre n'avoir jamais vu. Cette vision fugace lui donna envie d'en voir plus. Fatiguée, elle ferma les yeux en s’abandonnant à ce qui l’entraînait implacablement vers le haut.

Syn réapparut sur le toit du château. Il avait remarqué ces petites nuances d'améthyste scintiller dans ses yeux sombres et avait décidé de ne pas la distraire alors qu’elle cherchait au plus profond de ses pensées. Il avait déjà vu la couleur de ses iris changer, mais seulement quand elle utilisait ses pouvoirs. C'était la seule fois qu'elle s’autorisait à ressentir l'âme puissante qu'elle avait emprisonnée au plus profond d'elle-même.

Il comprenait pourquoi elle protégeait inconsciemment son âme d'un monde où la vie et la mort des mortels pouvaient changer en un clin d'œil. C'était de l'instinct pur, mais cette crainte n'était plus acceptable. À l’instant même où elle l'avait appelé de cette grotte sombre, il lui avait envoyé son pouvoir sous la forme de cette marque qu’elle avait sur sa paume. Plus tard, il avait renforcé ce pouvoir en lui insufflant sa force vitale… même si elle n'était pas consciente de l'importance d'un tel échange.

Elle avait maintenant des capacités dont elle n'était même pas consciente et il ne l'avait pas aidée à s'en rendre compte pour des raisons purement égoïstes. Elle était déjà trop indépendante à son goût. Et même si le temps n'était plus son ennemi et que la plupart des blessures guériraient instantanément, elle était toujours en danger à cause des puissants immortels qui avaient déclaré la guerre à cette ville.

Il y avait encore une chose qu'il pouvait faire pour elle et qui aiderait à égaliser leurs chances, mais il allait devoir être patient, parce qu’il savait qu'elle n'était pas encore prête pour les effets secondaires du mélange de leur sang. Il avait déjà fait cette erreur auparavant. Ce n'était pas la même chose que lorsque leurs enfants partageaient leur sang avec leurs âmes sœurs.

Il fit glisser son regard du toit en ressentant le silence qui venait de la pièce qui se trouvait juste sous lui. En plus, il se disait que s'il la mordait maintenant, elle verrait ça comme la preuve qu'il était exactement ce qu'elle s'était convaincue qu'il était : un monstre.

Être doux avec elle la mettait en danger et il n'en fallait pas beaucoup plus pour le tenter de devenir le monstre dont elle avait besoin. Après tout… il avait déjà joué ce rôle auparavant.

Chapitre 5

Kriss se tenait devant l'immense baie vitrée de leur appartement, une bouteille de Heat, le fameux mélange de Kat, dans une main, et un verre de vin surdimensionné dans l'autre. Il voulait se soûler, mais son métabolisme agaçant et rapide ne lui permettait pas d'obtenir la libération qu'il désirait pour juste quelques instants fugaces. De plus en plus frustré, il serra la main autour du verre, le brisant accidentellement dans sa paume alors qu'il se rappelait qu’il n’avait pas vu Vincent depuis des lustres.

Certes, Vincent ne se souviendra pas de leur première rencontre depuis que Storm avait fait demi-tour… mais Kriss n'oubliera jamais cette expression de haine qu’il lui avait adressée. En rejetant cette haine, il s'était rebellé contre les souvenirs de son enfance, à l'époque où Vincent avait ressenti pour lui exactement les sentiments inverses.

Il n'était pas dans ce monde depuis longtemps quand Dean s'était envolé pour arrêter une horde de démons qui se dirigeaient droit sur eux. Il avait attendu, seul, caché parmi les énormes rochers au pied d'une falaise, suivant les ordres stricts de Dean qui étaient de rester tranquille et caché… parce que cet endroit était sûr. Dans cette histoire, Dean avait eu raison sur certaines choses.

Depuis des jours, Kriss n'avait pas vu d'animaux… encore moins d'humains ou de démons. C'était la première fois de sa vie qu'il se retrouvait seul. Le silence qui l'entourait ne faisait qu'alimenter le sentiment d'abandon et de peur qu'il ressentait en attendant l'amour qu'il avait reçu dans son monde natal et la chaleur et la sécurité que Dean lui y avait données.

Ce fut au milieu de la nuit que Kriss entendit un bruit de cailloux tombant de quelque part juste au-dessus de lui. Il s'était adossé contre l'un des rochers et avait levé les yeux vers la falaise où la lumière du croissant de lune l’atteignait à peine. Tout ce qu’il put voir n’était que de sombres silhouettes ressemblant à des silhouettes de démons ramper vers lui. Il était comme fasciné par la façon dont leurs yeux rouge sang brillaient lorsqu'il les voyait les observer, et par la manière dont leurs corps presque humains se tordaient de la façon la plus effrayante qui soit lorsqu'ils se mouvaient dans l’espace. Il aiguisa son regard, afin de pouvoir se rendre compte que leurs corps décharnés semblaient avoir brûlé de manière profonde, comme si elles venaient de sortir d'un feu invisible. Il pouvait même sentir la pourriture de la viande rôtie à mesure qu'ils se rapprochaient.

Il avait eu si peur qu'il avait rampé en arrière et était tombé de l'autre côté, atterrissant violemment sur un tas de petits rochers pointus qui s'élançaient du sol comme des milliers de pics. Constatant qu'il avait été blessé à plusieurs endroits, il lutta pour se relever en essayant de ne pas empirer son cas.

Au moment où l'odeur de son sang non contaminé s’envola dans la brise, il entendit leurs griffes acérées gratter les rochers. Plusieurs coups de tonnerre lui indiquèrent que certains des démons avaient tout bêtement sauté depuis leur rocher pour l'atteindre.

Et puis, le silence disparut, et fut remplacé par leurs cris troublants qui résonnaient sur les rochers, ce qui lui donna l'impression qu'il y en avait beaucoup plus qu'ils n'étaient en réalité. Passant au-delà des rochers pour s'enfuir, il ne parvint qu'à déchirer ses vêtements et à s’égratigner à plusieurs endroits avant d'atteindre un endroit plus stable pour pouvoir enfin se lever.

En faisant un tour des environs, Kriss se rendit compte qu'il était trop tard pour courir ou essayer de se cacher… il était entouré de démons et ils étaient tous bien plus grands que sa taille d’enfant. Il se tenait debout, figé sur place, alors que de longs doigts griffus venaient de derrière lui pour s'enrouler autour de son visage. Des griffes affûtées lui tranchaient l'arête du nez et les joues pendant qu’un démon le tordait en arrière, puis le secouait brusquement dans les airs comme pour le montrer à ses congénères.

Il n'avait jamais eu à se battre dans son monde et Dean ne lui avait jamais autorisé à se battre dans celui-ci. Il y eut un moment fugace où il se demanda s'il ne valait pas mieux les laisser l'engloutir, plutôt que de rester seul dans cet endroit effrayant. Cette pensée s'évanouit rapidement lorsqu’une douleur se diffusa soudainement en lui, provoquant son instinct de survie à donner un coup de pied vengeur.

Les larmes lui brouillant la vue, il gagna difficilement son premier combat à mort. Le silence régnait une fois de plus dans la zone et il jeta un coup d'œil à ce qu'il avait dans la main juste à temps pour voir sa lame de Déchu illuminée disparaître de sa prise sanglante. Sentant quelque chose peser sur son autre main, il tourna lentement la tête pour voir de quoi il s’agissait et vit des yeux démoniaques qui le fixaient d'un regard vide. Sa main était dans la bouche de la chose… agrippant sa mâchoire… il ne savait pas où était passé le reste de son corps. Il s'était accidentellement éraflé les articulations contre les dents pointues du démon lorsqu’il avait voulu arracher la main de sa bouche en agissant à la va-vite. Il parvint enfin à faire tomber sa tête au sol, qui roula loin de lui en frappant un rocher en plein œil à la fin de sa course.

Il pensa avoir entendu un rire. Mais il se dit qu'il provenait sûrement de l'intérieur de lui-même car tout semblait mort autour de lui. Incapable de supporter l'odeur rance ou la vue de ces corps mutilés, il se retourna et se mit à marcher lentement en direction des rayons de lumière qui apparaissaient sur les collines au loin.

Il ne savait pas combien de temps il avait marché, ni combien de jours il avait mis avant d'entendre un bruit de pas bizarres provenant de devant lui. Il resta là, debout en se balançant et en essayant de ne pas pleurer. En attendant de voir s'il aurait à se battre une fois de plus. C’était du sang de démon… il pouvait le sentir.

Il ne tarda pas à voir un homme monté sur un animal avancer vers lui. Des parties de son corps étaient recouvertes d'une sorte de métal tissé et il pouvait voir une longue épée attachée à son dos dont la poignée dépassait pour être à portée de main. Ne voyant pas de sang sur l'homme, il se rendit compte que c'était lui qui était couvert de sang de démon… depuis tout ce temps !

C'était sa première rencontre avec Vincent. Ils s'étaient regardés fixement alors que ce dernier approchait et Kriss fit plusieurs pas en arrière quand il glissa rapidement de l’animal imposant. Il tourna un regard effrayé en direction de l'épée.

– Ne fais confiance à personne d'autre que moi.

Le souvenir de la voix de Dean résonnait dans sa tête en guise d'avertissement et il se retourna pour s’enfuir.

– Attends… ne t’en vas pas, cria Vincent.

Le ton de sa voix rappelait Dean à Kriss, ce qui le rendit confus, et il ne sut que faire. Il en avait vraiment marre d'essayer de tout comprendre. Il jeta un œil en arrière pour s'assurer que l'homme n'avait pas sorti son épée au moment où il ne le regardait pas.

Vincent poussa un soupir de soulagement en voyant l'enfant s'arrêter. Il lui lança un regard en arrière avec un mélange de curiosité et de scepticisme. Les deux derniers villages qu'il avait traversés étaient dans un chaos sanglant et il n'avait pas trouvé de survivants jusqu'à maintenant. Même sale et couvert de sang, ce garçon semblait en bonne santé et très effrayé, ce qui l'amena à en conclure qu'il s’agissait bien d’un survivant de l'un des villages.

– Où sont tes parents ? lui demanda-t-il, laissant l'inquiétude couper sa voix dans l'espoir de gagner la confiance de l'enfant.

Où étaient ses parents ?

Cette question avait attristé Kriss. Son père n'était même pas dans cette dimension et l'avait probablement déjà oublié… Dean l'avait quitté et n'était jamais revenu. Il sentit la chaleur des larmes lui faire de nouvelles traces sur les joues. Tout ce qu’il trouva à faire pour répondre, c’était de secouer la tête lentement au moment où il se retournait pour faire face à l'homme.

– Tu es blessé ? lui demanda Vincent en venant s'agenouiller devant lui pour ne pas l’intimider à cause de sa taille, assez imposante… l’enfant ne pouvait pas avoir plus de neuf ou dix ans. Il tendit lentement une main et lui palpa la joue sale, la frottant avec le pouce pour lui essuyer les larmes.

Kriss se demanda à quoi cet humain pouvait bien penser en le regardant… il était couvert de sang et portait des vêtements qui ressemblaient à de vraies loques. Comme presque toutes ses blessures étaient déjà guéries et qu'il savait qu'il ne fallait pas dire à un humain ce qu’il s'était réellement passé, il répondit en ne mentionnant que la seule chose vraie de son histoire.

– Je suis tout seul, maintenant.

Puis il se mit à pleurer pour de bon… de bruyants gémissements mêlés au bruit de ses hoquets, poussant Vincent à le prendre dans ses bras en lui chuchotant que tout allait bien maintenant, parce qu'il allait le protéger et prendre soin de lui.

Et en effet, Vincent l'avait protégé, au point de sacrifier sa propre vie.

La douleur du verre brisé dans sa paume ramena Kriss au moment présent. Il ouvrit le poing en voyant le morceau de verre qui en sortait.

C'est ce que Dean avait trouvé quand il était sorti de la salle de bain après avoir pris sa douche. Il fronça les sourcils en voyant Kriss debout face à lui, qui tentait d’extraire un éclat de verre de sa paume. En claquant la porte derrière lui, l’autre Déchu se mit à vaciller et leurs yeux se concentrèrent sur leur reflet dans la vitre. Il n'était pas d'humeur à regarder son amant déchirer une fois de plus cette matinée de son enfance. Une fois avait été plus qu'assez.

Kriss prit une grande inspiration en essayant de soulager la douleur dans sa poitrine.

– Je n'aurais jamais pensé le revoir, Dean. Une partie de moi espérait qu'il m'aurait déjà pardonné. J'essayais juste de lui sauver la vie.

– Kriss, c'était un mortel. Tu as fait beaucoup plus que de lui sauver la vie et tu le sais très bien, dit Dean. Grâce à toi, il peut maintenant ressentir la douleur de la mort… pour l'éternité. Mais aussi, la revivre. Et s'en plaindre. L'esprit humain ne peut pas tout supporter. C'est pourquoi leur durée de vie est faite pour être courte.

– Je sais, grogna Kriss. Tu n'as jamais hésité à me le rappeler. J'ai pris une décision égoïste, mais j'étais tout seul dans un monde où les démons erraient librement, et je ne pensais pas que tu reviendrais. Tu étais parti il y a si longtemps que j'avais peur que les démons t'aient tué… je ne voulais pas le perdre, lui aussi.

Dean soupira et essaya de garder son sang-froid.

– Tu t’es inquiété pour rien : tu l’aurais su, s’il m'était arrivé quelque chose.

– Dean ! Je n'étais qu’un enfant, répondit Kriss. Tout ce que je voulais, c'était que quelqu'un s'occupe de moi ! Et que je m'occupe de cette personne en retour !

– Oooohhh ! Pôv’ petit chou ! ! ! se moqua Dean, bien conscient que le prince adolescent était tombé amoureux du chevalier pendant son absence. Ce petit détail était pour lui une pilule difficile à avaler alors qu'il regardait Kriss pleurer la perte de son amour. Il serra des dents en se demandant si ce dernier n’était pas en train de redevenir obsédé par le coup de foudre de son enfance.

Kriss jeta sa bouteille de Heat à travers la pièce et Dean se pencha légèrement d’un côté pour éviter qu’elle l’intercepte dans sa trajectoire.

– Va te faire foutre, Dean !

– Ahhh ! ! Voilà mon petit prince morveux dans toute sa splendeur !

Sans un mot de plus, Kriss se jeta sur lui, prêt à lui coller un poing au visage.

Dean était prêt à cette attaque. Il attrapa son poing d'une main, et le devant de sa chemise, de l'autre. Avec peu d'efforts, il prit l’élan de la rage du prince Déchu, qui se retrouva au sol. Plusieurs boutons sautèrent sur le plancher, lui laissant la chemise ouverte.

– Tu peux réessayer, si tu le souhaites, l’informa Dean en le regardant de plus près. Je peux faire ça toute la nuit.

Kriss s'affaissa contre le sol comme s'il abandonnait, puis il enfonça soudainement son poing dans la joue de Dean, faisant claquer sa tête sur le côté.

– De toute façon, tu peux pas comprendre ! cria Kriss en le frappant au niveau de l'estomac. Tu ne t'es jamais soucié de savoir si tu étais tout seul ou pas. Tu l'as prouvé quand tu es parti comme un voleur… c’était… quand… pas plus tard qu'hier ? Si l'ambroisie fonctionnait sur les Déchus, je te l'aurais enfoncée dans ta gorge d’égoïste et je n'aurais eu aucun remords à te tuer.

Dean atterrit sur ses pieds et dérapa en arrière sous la force du coup. Alors finalement, Kriss était toujours en colère contre lui ? Ou bien est-ce qu'il lui rejetait tout ça en pleine figure maintenant que son ex-petit ami était de retour en ville ? Sa jalousie se réveilla vite à cette idée.

– Si j'avais su que tu possédais plus que cette seule goutte de la malédiction, je te l'aurais prise juste après que tu aies damné Vincent sur cette terre pour l'éternité ! l’avertit-il alors que Kriss se relevait lentement du sol.

Ne cédant pas devant son semblant de calme une seconde fois, il était préparé à ce que Kriss le percute, ce qui les entraîna dans une chute les écrasant presque à travers la baie vitrée. Dean retourna rapidement Kriss et lui pressa le visage contre le verre épais. Il lui serra un bras autour de la gorge ; l'autre, toujours sous sa chemise ouverte, lui barrait la cage thoracique, ce qui mettait Kriss dans l’impossibilité de se débattre.

– Tu n'es qu'un enfant égoïste et tu l'as prouvé quand tu as jeté à Chad cette malédiction, il y a quelques semaines…

Le sarcasme était à son comble et c’est Dean lui envoya cette raillerie en pleine face. Leurs regards furieux se fixèrent encore dans le reflet de la vitre qui se trouvait juste face à eux.

– J'ai d'abord demandé à Chad et il a accepté… même s'il ne se souvient pas de ma question. Si je lui demandais à nouveau, sa réponse serait la même. Ça sauve des vies, mais tu as toujours regardé l'ambroisie comme si c'était une malédiction… pourquoi ?

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