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La Pire Espèce
La Pire Espèce
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La Pire Espèce

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La Pire Espèce
Chiara Zaccardi

Roman d'horreur qui raconte l'enlèvement de plusieurs adolescents américains dans un coûteux lycée privée.

Ils ont 17 ans, vivent à Cles, petite ville tranquille de la Californie, et fréquentent un coûteux lycée privé. La vie de sept adolescents semble ressembler à celle de beaucoup d'autres. En réalité, il y a plus que ça: ils sont les plus voyous, les plus rebelles, les plus indisciplinés. Leur turbulence risque de les faire renvoyer et les contraint à suivre le soir un cours de rééducation. Mais, la nuit, entre les murs de la Kennedy High School, se passe quelque chose, et le lieu que les jeunes ont toujours considéré familier et sûr se transforme en cauchemar. Séquestrés et torturés, ils réussissent à fuir, mais... Une narration palpitante, dans un va-et-vient de coups de théâtre, qui nous tient en haleine. Et puis, une fin surprenante qui renverse tout. Un texte qui raconte comment se comportent les nouvelles générations et qui révèle de manière allégorique comment la société tend à marginaliser les adolescents, à les conditionner aux biens superflus, leur enlevant l'essentiel et aussi la capacité à distinguer le bien et le mal, pour qu'ils finissent par ressembler en tous points aux adultes.

Le livre

Ils ont 17 ans, vivent à Cles, petite ville tranquille de la Californie, et fréquentent un coûteux lycée privé. La vie de sept adolescents semble ressembler à celle de beaucoup d`autres. En réalité, il y a plus que ça: ils sont les plus voyous, les plus rebelles, les plus indisciplinés.

Leur turbulence risque de les faire renvoyer et les contraint à suivre le soir un cours de rééducation. Mais, la nuit, entre les murs de la Kennedy High School, se passe quelque chose, et le lieu que les jeunes ont toujours considéré familier et sûr se transforme en cauchemar. Séquestrés et torturés, ils réussissent à fuir, mais... Une narration palpitante, dans un va-et-vient de coups de théâtre, qui nous tient en haleine. Et puis, une fin surprenante qui renverse tout. Un texte qui raconte comment se comportent les nouvelles générations et qui révèle de manière allégorique comment la société tend à marginaliser les adolescents, à les conditionner aux biens superflus, leur enlevant l’essentiel et aussi la capacité à distinguer le bien et le mal, pour qu’ils finissent par ressembler en tous points aux adultes.

L’auteur

Chiara Zaccardi, promotion 1986, est née et vit à Parme. En Italie elle a publié aux Editions Noubs le roman d’horreur “ I peggiori ” et la nouvelle “ Occasion ” dans l`anthologie “ Limite acque sicure ”. Est parue aux Editions Arpanet, la nouvelle “ Parma, ore 3 ” dans l’anthologie “ E tutti lavorammo a stento ”. Une autre nouvelle, “ I gioccatoli siamo noi ”est arrivé parmi les cinq finalistes du Premio Grado Giallo crée par la ville de Grado en collaboration avec le Giallo Mondadori (2012).

Chiara Zaccardi

LA PIRE ESPÈCE

Traduction de Emma Guerry

LE CHOIX

MERCREDI 13 MARS.

HIGHWAY 22, À 15 MILLES DE CLES, CALIFORNIE.

“ … Aucun accord, aucune concession, aucune paix, cette fois-ci nous le faisons sérieusement ”

Adolf Hitler

La fourgonnette, toute flambant neuve et achetée avec de faux documents, roule rapidement sur l’autoroute qui mène hors de la ville et hors du pays. La radio, une des seules options qu’il ait acceptée, transmet en musique de fond une version acerbe de Tainted love. Les paroles lui plaisent. Elles parlent de maladie, de putréfaction. De rédemption.

La voix parasite du dj au micro interrompt la chanson, déferlant une onde d’agacement, qui se transforme, comme d’habitude, en un fourmillement d’excitation dans ses doigts. Il le ressent et le laisse l’envahir. Il ne se préoccupe même pas de changer de station. Il sait que ce n’est pas nécessaire. Bientôt, il pourra laisser libre cours à ses émotions les plus enfouies, complètement et pleinement. Mieux encore, il veut sentir l’excitation et la tension dans tout le corps, pour qu’ensuite la libération soit totale. Il s’apprête à éteindre et à se concentrer sur lui-même, lorsqu’involontairement, il prête attention aux paroles qui s’échappent de l’appareil :

“ Tu es fatigué des soirées de défonce ? Tu veux vivre les expériences les plus extrêmes de ta ville ? Alors, visite le site Rebellioncity.com et partage avec nous tes meilleurs vidéos amateurs ”annonce une publicité “ Because the life must to be strong ! ”

S’ensuit un refrain en fond sonore et une voix souligne, qu’en dehors de la monotonie habituelle, il existe quelque chose de mieux.

C’est surtout un truc pour les gens qui ont perdu la tête.

Le mot de la fin, hurlé sur un refrain rock, laisse place au spot suivant.

Rebellion.

Une idée intéressante. C’est exactement ce qu’il lui faut. Et c’est le moment idéal pour faire une pause dans son voyage, qui s’annonçe compliqué et fatiguant.

Il s’arrête à la première station-service équipée de postes internet, prend un café long et s’installe devant un ordinateur.

Il entre sur la page d’accueil dudit site et lance les dernières vidéos en ligne, sans le son.

Il comprend rapidement que ce n’est pas ce qu’il cherche : il s’agit pour la plupart d’imbéciles qui se la jouent skaters et de petits putains en topless sur la plage. Il s’attendait à mieux.

Et il le trouve.

En bas du menu, apparaît un lien clignotant, avec un seul mot. “ Agressives ”. Il clique dessus et s’ouvre une nouvelle fenêtre. Les vidéos ont là aussi des ambiances diverses, mais le spectacle est tout à fait différent.

Il les visionne toutes. Toutes d’une faible qualité numérique, toutes tournées avec les portables. Toutes sur un excellent sujet.

Finalement, il en sélectionne quelques-unes.

Vidéo numéro 38, postée à 08 : 25.

« Cette robe est canon, il faut absolument que je me trouve la même » .

Une voix féminine. Une contre-plongée d’une fille devant le miroir des toilettes.

« Tu ne trouveras jamais la même que moi, c’était la dernière au magasin ! »

Cri derrière la porte, voix très excitées, grognements.

« Qu’est-ce qu’il s’est passé bordel ? ! »

La caméra du portable saute au rythme des pas précipités, la porte des toilettes s’ouvre et l’on découvre le couloir d’une école.

« … Je prendrai moi-même ce qui me revient ! » hurle une voix masculine.

La caméra se déplace, cadre le fond du couloir et s’approche. Un grand gamin avec un tatouage au poignet donne un coup de poing à un autre, rouge et rondelet.

« Fils de… ! »

Le rondelet se jette sur le grand type, ils se battent, un troisième se met entre eux pour calmer le jeu. Tout se termine en peu de temps.

« Oh, toujours la même histoire… » reprend la voix féminine. « Quelle bande d’idiots… Partons de là. Ils ne méritent pas d’être filmés » .

Il remet en arrière la barre de défilement. Repartent les dernières secondes de la vidéo. La bagarre calmée, le grand type se relève. Un mouvement rapide, légèrement non coordonné.

Stop. En arrière. En avant.

Oui.

Le type se relève et, furtivement, vole le portefeuille au rondelet.

Un seul geste, sûr.

Un sourire lui échappe.

Vidéo numéro 49, postée à 17 : 23.

Le cortège se déplace lentement, les drapeaux flottent, les banderoles avancent.

« Non à la globalisation, non à l’homologation » hurle la foule. « Contre les fast-food, contre la société de consommation, contre l’oppression, nous faisons entendre la voix de l’opposition ! »

« Range ça » voix masculine. « S’ils reconnaissent nos visages ils nous bloquent » .

« C’est très beau ici, non ? » voix féminine. « Je sens que nous pourrions tout changer ! » claquement d’un bisou.

Le groupe tourne, tout en continuant à chanter. Quartiers raffinés, villas blanches.

« Oh si, quelque chose peut sûrement être changé » un bras passe devant l’objectif, s’élance puis quelque chose s’envole loin. Crash. Une fenêtre explose en morceaux.

« Wow ! Tu es le héro de la révolution ! » la voix féminine rit, le téléphone tourne et oscille.

Et, grâce à un unique acte manqué, la voix masculine se transforme et prend une toute autre apparence.

Vidéo numéro 47, postée à 09 : 18.

« Qu’est-ce qu’elle est vulgaire ! »

Gloussement. Brouhaha de fond.

La prise de vue se focalise sur deux rangées de tables. En premier plan, une enseignante à l’expression sévère agite une feuille sous le nez d’une fillette en pleurs.

« Je n’ai pas pu me préparer comme il faut... » se justifie la fillette. « Vous voyez, mon oncle est mort et... »

« Bum » commente la voix féminine et l’autre recouvre la conversation d’un fou rire grossier qu’elle est incapable de contenir.

« ... Et le mois prochain, qui mourra ? » répond l’enseignante.

« ELLE, J’ESPÈRE ! » hurle la fillette, dans la classe, les bavardages explosent et la caméra oscille.

La fillette pleure, au bord de l’hystérie et sourde aux réprimandes qui lui sont adresssées.

« Vous ne comprenez rien, absolument rien ! » crie-t-elle à l’enseignante. Elle bondit sur ses pieds et court en direction de la porte.

« Et encore, ce n’est pas sa meilleure performance » commente celui qui est en train de filmer.

Nouveaux fous rires.

Quelqu’un applaudit.

Vidéo numéro 62, postée à 21 : 41.

« Putain, t’es de plus en plus folle » .

Le portable passe une porte en verre soufflé, opaque, et entre dans une minuscule salle de bain d’une maison.

« Ôte-toi de là » dit une fille portant une serviette sur la tête.

« Allez, montre le résultat ! »

Une main apparaît devant l’objectif et, d’un geste éclair, attrappe la serviette, la faisant glisser à terre. Une masse de cheveux longs et humides se dégage et retombe sur les épaules de la fille.

« Bon Dieu, tu les as teints en violet ! C’est le moment d’appeler l’asile pour qu’il vienne te chercher ! »

« Tu veux bien arrêter ? » elle met ses cheveux d’un côté et commence à les peigner.

« Et ça, c’est quoi ? C’est nouveau ? »

Zoom sur l’épaule restée découverte. Un tatouage hurle en noir l’écriture “ R.E.P ”.

« Pourquoi repose en paix ? »

« C’est un clin d’oeil à tous ceux qui restent en arrière, qui regardent et qui se mêlent des affaires des autres ! »

La fille récupère la serviette et commence à toucher la caméra avec celle qui la tient.

« Allez, laisse-moi avant que je te mette dehors ! »

« Aïe, aïe, ça va, je m’en vais, arrête ! »

L’objectif se fige sur la silhouette de la fille.

Trois tatouages et deux piercings visibles.

Vidéo numéro 95, postée à 07 : 55.

« Sam, conduis lentement, sinon on n’y voit rien... »

Bruits de fond, prise de vue depuis une voiture.

« Okay, je commence... Bonjour de Sam et Nick et bienvenus à la présentation d’une énième et très excitante journée d’école. Nous remercions la prof. Harris pour nous avoir contraints à montrer notre créativité matinale » .

S’ensuit un juron d’accompagnement.

« Derrière nous, vous pouvez admirer le bord de mer, dont nous ne profiterons pas aujourd’hui non plus, et de ce côté, nous entrons dans la cour de l’école, où nous voyons les mêmes gueules renfrognées – aussi enthousiastes que nous qui avons encore un mois à attendre avant les vacances d’été – et des échanges dignes des auto-tamponneuses pour les dernières places de parking libres... Désormais, tout est plein et on pourrait carrément rentrer à la maison, mais avant, vous ne pouvez pas manquer notre terrain de foot... Avance Sam, j’ai dit terrain de foot... »

La voiture tourne à l’angle du bâtiment.

« ... C’est-à-dire la seule chose décente de notre sympathique établissement scolaire... Ehi, je suis en train de me tromper ! Voilà un nouveau chef d’oeuvre ! »

L’objectif est avancé hors de la fenêtre baissée, en même temps qu’un rapide virage à gauche est amorcé : « Hier soir, notre artiste devait être très énervé. On est tous comme toi l’ami » .

Une paroi immense couvre la moitié d’une façade de cinq étages.

Immense, la demi-figure d’un crâne encapuchonné se profile devant le terrain de foot et, émergeant de profil dans la brume d’une vallée désolée, associe un sourire à un inquiétant clin d’oeil.

La signature de l’auteur, d’un jaune brillant qui contraste avec la profondeur du sujet, n’est ni un sigle ni un nom : c’est une phrase entière. Une phrase criarde.