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- Tu as dit, (et, oh, j’aurai voulu ne pas entendre la suite) que tu ne pouvais pas croire à quel point je t’attirais. Que tu te sentais coupable parce que tu pensais à moi plus qu’au travail ou à ce qui était arrivé à tes parents...
Nick trébuchait sur ses mots, luttant pour faire sortir quelque chose.
- Tu as dit à Emily que tu ne pouvais pas t’empêcher d’être amoureuse de moi.
Oh, mon Dieu. Oh, mon Dieu. Tout ce sang brûlant qui se vidait de mon visage. J’avais dit ça au téléphone à Emily. Elle avait appelé pour s’assurer que je venais directement à la séance, et j’avais détourné la conversation vers Nick. C’était une chose tellement normale que je l’avais oubliée. Bon sang, c’était tellement normal qu’elle avait probablement fait abstraction de tout ça. Soudain, je sus à quel point j’étais ivre, et la pièce se mit à tourner.
Je forçai un rire à briser du cristal.
- Oui, j’ai mentionné ton nom, mais ce n’est pas ce que j’ai dit.
- Non, c’était bien ça, interrompit-il. Je ne suis pas un crétin. Je sais ce que j’ai entendu.
- Eh bien, tu l’as mal interprété, insistais-je. Je ne cours pas après toi, Nick. Pour ce que j’en sais, tu es toujours marié. Et nous travaillons ensemble. Je suis désolée si je t’ai mis mal à l’aise. Je vais essayer de ne pas le refaire.
- Tu ne m’as pas mis mal à l’aise.
Il s’arrêta et passé la main dans les cheveux une troisième fois, fixant à nouveau la serviette. Il y avait quelque chose d’écrit sur cette foutue chose.
- C’est juste que... Il soupira et n’alla pas plus loin.
- Juste quoi ?
Pas de réponse. J’aurai aimé que ce soit seulement l’alcool qui me fasse sortir des sarcasmes, mais ce n’était pas le cas.
- Pourquoi ne pas consulter ta serviette magique pour savoir ce que tu dois dire ?
Son visage s’assombrit.
- C’est pas sympa.
J’étais en train d’accumuler de la pression.
- Eh bien, il semble que tu sois venu me voir avec ton discours tout préparé. Remettre la pauvre Katie en mal d’amour à sa place.
Je pris une inspiration et je crachai :
- Je n’arrive pas à croire que tu aies dû prendre des notes sur une serviette de bar.
- Je ne suis pas aussi bon que toi avec les mots, Madame l’avocate. Je voulais faire ça correctement. Ne te moque pas de moi parce que je te prends au sérieux.
- Désolée de t’avoir causé tant de problèmes.
Je n’étais pas désolée sur le moment, et je pense que mon ton le lui fit comprendre.
- Mais je t’en prie, finis de lire ta serviette.
Il se leva.
- Il n’y a rien d’autre qui vaille la peine de discuter.
Trop tard, j’avais vu à quel point j’étais nulle.
- Nick, je suis désolée. Oublie ce que j’ai dit. J’ai trop bu. Merde, je bois trop ces derniers temps, et je vais vraiment réduire ma consommation. J’espère que cela ne fera pas reculer notre amitié, et que nous pourrons continuer à travailler normalement. Tu sais comment je suis. Je suis bien trop excessive, et j’ai une grande gueule.
J’interrompis mon bavardage inutile et luttai pour garder le contact visuel avec lui.
Mes pensées étaient devenues confuses. Comment avais-je pu me tromper autant sur lui ? J’ai toujours cru qu’au fond, il était aussi attiré par moi - et pas seulement sur le plan physique - que je l’étais par lui. Que si je lui donnais la bonne ouverture et le bon coup de pouce, il m’emporterait dans son carrosse magique et me conduirait au bonheur.
Comme c’était ridicule. Je n’étais pas Cendrillon. J’étais Glenn Close avec le lapin bouilli dans Liaison fatale. Et il était Michael Douglas cherchant un moyen de s’échapper.
Je ne savais pas comment récupérer les choses. Ses yeux devenaient plus hostiles à chaque seconde. Sans m’adresser un mot de plus, il s’en alla avec sa fichue serviette à la main.
Chapitre 3
L’Eldorado, Shreveport, Louisiane
Le 15 mars 2012
Je me réveillai avec une méchante gueule de bois qui provenait autant de l’humiliation que de l’Amstel Light et du vin du mini-bar, puis je me souvins de Nick dans ma chambre et de la façon dont j’avais agi. Il semblait peu probable d’avoir fait pire, mais au moins je ne lui avais pas ouvert la porte nue avec une rose entre les dents. J’allais me lever et me ressaisir. J’allais être séduisante dans mon ensemble Ellen Tracy vert mousse. J’allais réparer tout ça.
Mais d’abord, je voulais lire mes textos parce que mon téléphone vibrait. À cette heure matinale ?
- Où diable es-tu ?
C’était Emily.
- ?? Je me prépare.
Ce n’était pas totalement vrai, mais la règle cardinale des textos étant d’être brefs, j’avais omis les détails révélateurs.
- Nous avons commencé. Dépêche-toi !
Peut-être que ce n’était pas aussi tôt que je le pensais.
- J’arrive.
Eh bien, avoir l’air sexy et professionnelle étaient hors de question maintenant, bien que je ne sache pas si j’aurai pu réaliser cela dans ces circonstances, peu importe le temps dont je disposais. Je me ressaisis en respectant les minima hygiéniques et esthétiques et je m’en allais rejoindre la session de consolidation d’équipe du deuxième et dernier jour de ce séjour. J’espérais pouvoir assez bien simuler pour berner mes collègues.
Je m’arrêtai devant la porte ouverte de la salle de conférence et j’écoutai le présentateur. L’entreprise avait engagé un consultant en expression émotionnelle pour nous aider à résoudre les problèmes que nous avions les uns avec les autres de manière positive et constructive.
Bonne chance avec ça, pensais-je. Je me demandais s’il m’aiderait à résoudre mon « Je veux coucher avec mon collègue de travail qui est peut-être encore marié et qui, en fait, me déteste ».
Ce n’était pas une session du genre de celles qui sentent la violette, cependant, le consultant était en fait assez bon. Aujourd’hui, il nous apprenait à parler de ce dont nous avions besoin de plus et de moins de la part des autres. Il nous demanda de nous associer à la personne avec laquelle nous avions le plus besoin d’entretenir une relation de travail efficace.
J’entrai dans la salle de conférence aux fleurs criardes. En quelques secondes, presque tous les couples se formèrent. Je balayai la pièce du regard à la recherche des long cheveux blonds texans d’Emily, espérant qu’elle m’avait attendu, mais elle était avec l’assistant juridique principal, prenant l’activité beaucoup trop au sérieux. Je lui lançai un regard furieux et elle haussa les sourcils, comme pour dire : « Ce n’est pas ma faute si tu me poses un lapin et que tu ne peux pas sortir du lit avant midi. » Tout en grommelant dans ma barbe, je cherchai un partenaire dans la pièce.
Alors que je scannai l’espace, le regard terne de Nick se fixa lentement sur le mien. Pas bon. Je conservai également un visage sans expression, un effort gargantuesque si l’on considère que le mélange de fruits secs du minibar de la veille semblait vouloir remonter. Je me détournai, puis je réalisai qu’il marchait vers moi. Je m’attendais à ce qu’il continue son chemin, jusqu’à ce qu’il s’arrête devant moi.
Comme il restait silencieux, j’ouvris la bouche. Je ne pouvais pas m’en empêcher. J’ai toujours pris les reines. Pas étonnant que mon grand frère m’ait dit que je repoussais les hommes.
- Alors, tu veux finir les restes ?
Je tentais un sourire d’autodérision.
Il ne me retourna pas mon sourire.
- C’est le meilleur moyen d’éclaircir tout ça et de nous mettre d’accord avant de retourner au bureau.
Il faisait aller et venir sa main entre nous. Ça me rappela la nuit dernière, et pas dans le bon sens.
Nous nous assîmes. Les fleurs sur le papier peint et le sol ne faisaient pas grand-chose pour me remonter le moral. Les lianes du tapis se mirent à onduler et s’enroulèrent autour de mes chevilles, me ligotant aux pieds de ma chaise. Non, imbécile, c’est ton imagination et une bonne gueule de bois. Ugh. Troublant. Je passai mes mains sur mes avant-bras, essayant d’atténuer ma chair de poule.
Nick lisait les instructions à haute voix. Nous allions devoir suivre la liste d’exercices à tour de rôle. Tout d’abord, nous allions devoir énoncer ce que nous trouvions de positif chez l’autre ; ensuite, les choses dont nous avions besoin en plus ou en moins ; et enfin, ce que nous allions nous engager à faire en plus ou en moins pour l’autre. Au cas où nous aurions oublié ces instructions en cours d’exercice, elles étaient inscrites en caractères gras en couleur sur les tableaux de conférence tout autour de la salle. Je vous remercie, tableaux, d’interrompre ce cauchemar fleuri, pensais-je.
- Tu commences, Nick. Je pense que tu dois énoncer ce que tu apprécies chez moi.
Dis-je d’un ton enjoué.
Il commença très sérieux, sans hésiter.
- J’apprécie que tu sois professionnelle, tu fais un bon travail et tu travailles dur. Tu es importante pour le cabinet.
Pas vraiment chaleureux.
- Merci, Nick. Autre chose ? Tu peux continuer à faire des compliments si tu veux. J’essayais un autre sourire, inclinant la tête vers la droite. Mon meilleur profil.
- C’est tout.
Ça ne se passait bien.
- Bon, alors, ce que j’apprécie chez toi, c’est...
Alors qu’il avait pris la voie strictement professionnelle, je refusais d’être aussi impersonnelle,
- Ta créativité et ta perspicacité, et la façon dont nous avons travaillé ensemble sur l’affaire Burnside.
Je canalisais la langue de bois de l’atmosphère, une version légale d’un mauvais épisode de Dr Phil.
- Et j’apprécie que tu n’aies pas de serviette en papier avec toi aujourd’hui.
Clin d’œil mental - Nick, dépassons ça.
Aucune chance.
- Maintenant nous faisons la partie suivante, plus et moins.
Il passa ses mains dans ses cheveux. Oh oh.
- Ce que je veux, c’est que tu fasses plus souvent savoir à Gino que tu as besoin de mon soutien, et lui et moi nous pourrions faire le nécessaire. Ce que je veux que tu fasses moins, c’est...
Il hésita, puis continua,
- Me piéger.
Est-ce que j’avais mal entendu, ou est-ce que Nick venait de me larguer ? Et m’accusait de le harceler ? En si peu de mots. Même après la fin difficile de notre soirée, le coup de pied professionnel semblait extrême. Suggérait-il que je l’avais harcelé sexuellement ? Je passai de zéro à soixante sur le compteur de rage en moins d’une seconde. Oups.
- Tu ne veux plus travailler avec moi ? Je te PIÈGE ? Nous avons eu une seule conversation personnelle difficile, et tu refuses de travailler avec moi ?
- Peux-tu baisser d’un ton ? siffla-t-il.
Je levais les mains en l’air. Il prit ça pour un oui et continua.
- Je veux juste minimiser nos contacts, dit-il. Sa voix était aussi froide que ses yeux.
- C’est absurde.
La main de Nick se leva, et je montais le volume.
- Nous faisons une bonne équipe. C’est un énorme avantage pour cette entreprise quand nous travaillons ensemble. Je ne comprends pas pourquoi tu fais ça. C’est à cause d’hier soir ?
Une centaine d’yeux me regardaient m’effondrer dans un tas de débris émotionnel. Non, c’était juste ma paranoïa. Mes mains remontèrent vers mon col et tentèrent de le desserrer davantage.
- Je ne vais pas parler du pourquoi. J’ai juste besoin d’un peu d’espace. Si tu as un problème avec moi, tu devras aller voir Gino.
Moment de décision et de contrôle de soi. Si je faisais une scène plus importante, je l’embarrasserais, et ensuite je ne pourrais jamais revenir en arrière. J’avais passé la moitié de la nuit dernière à me réconcilier avec le fait qu’il n’y aurait jamais de « nous », pas de Nick et Katie. Je n’aimais pas pratiquer le droit, mais l’année dernière, j’avais adoré travailler avec Nick. Travailler avec lui, c’était mieux que rien. Cela pourrait même être suffisant. Mais s’il m’enlevait cette partie, il ne me resterait que moi avec des pensées que je ne voulais pas avoir.
Je devais aussi être réaliste. J’étais importante pour le cabinet, mais le futur ex-beau-père de Nick était notre plus gros client. Ce fossé devait rester entre Nick et moi. Il n’y aura pas de « aller voir Gino » pour moi. De plus, qu’est-ce que je lui dirais ? « Gino, Nick ne veut pas travailler avec moi parce qu’il pense que je veux coucher avec lui. Fais en sorte qu’il soit gentil avec moi ou je vais faire un caca nerveux. »
Je repris la parole avec des mots mesurés.
- Je suppose que je n’ai pas le choix. Je vais honorer tes souhaits, mais laisse-moi être claire à cent pour cent : C’est ta décision. Je ne comprends pas, et ce n’est pas ce que je veux. Je promets également d’être honnête avec toi. Je vais commencer par ça tout de suite.
Ça semblait être un bon point de départ, puisque je lui avais menti hier soir et qu’il le savait.
- Cela me fait mal. Tu me traites comme si tu me détestais. Nous avons eu un moment regrettable ce week-end. Je pense que nous devrions reparler de tout ça au bureau.
- Ça ne fera aucune différence, ici ou là-bas, dit Nick. Il se leva, mais je l’arrêtai.
- Attends. J’ai le droit de dire ce que je voudrais que tu fasses de plus ou de moins.
Il se rassit. J’ignorais la douleur lancinante dans mon estomac et je commençais.
- J’aimerais que tu fasses davantage preuve d’ouverture d’esprit et de moins juger et prendre moins de décisions irréfléchies.
- OK.
- OK, tu t’engages à le faire ?